Situation

Située au nord-est de Troyes (Aube), la RD 7, longue d’une vingtaine de kilomètres, relie la commune de Marcilly-le-Hayer à l’ouest à la Belle Étoile à l’est, en passant par Orvilliers-Saint-Julien.

État des lieux

Trafic + âge + conditions climatiques = dégradations structurelles. Cette équation a conduit à envisager une importante opération de réparation, comme c’est le cas pour 5 % environ du réseau secondaire français chaque année.

D’une largeur de chaussée de 5,50 m, la RD7 est empruntée par de nombreux poids lourds (PL) pendant la campagne de récolte betteravière. La RD7 enregistre un trafic de 80 PL/jour (classe T3), nettement supérieur à celui pour lequel elle a été conçue. Cette circulation PL a provoqué au fil du temps des dégradations de rives importantes et dangereuses. Des fissures longitudinales et transversales, des déformations, des nids-de-poule, du faïençage, des affaissements, des flaches et des orniérages étaient également observés. 

En outre, les prévisions ayant mis en évidence une augmentation inévitable du trafic dans l’avenir, cette restructuration doit permettre à la nouvelle chaussée de supporter une fréquentation en hausse, en améliorant par ailleurs la tenue au gel de la structure.
Les réparations ciblées ne suffisant plus et les symptômes des dégradations structurelles allant s’aggravant d’année en année, notamment à cause des infiltrations et du ruissellement, le département de l’Aube a pris la décision d’intervenir à grande échelle sur la moitié la plus dégradée du parcours, entre Saint-Flavy et la Belle Étoile, soit une longueur d’un peu plus de 10 km (10,19 km précisément), afin d’élargir et de renforcer la chaussée.
Après sondage, il s’avère que la chaussée, bien qu’ancienne, ne contient pas de HAP.

Projet

Dans un premier temps, le département envisage un « renforcement épais », c’est-à-dire le rechargement de l’ancienne chaussée par une couche de 13 cm de grave-bitume, avec un élargissement à 6 m (+ 0,5 m par rapport à l’existant). Cette solution classique présente cependant plusieurs inconvénients : coût, durée, incidences environnementales (ponction sur les ressources en granulats, transport de matériaux par noria de camions, interruption de circulation…)

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Lors de l’appel d’offres, s’appuyant sur différents prélèvements et études préalables validant la faisabilité (aptitude du matériau au traitement, absence de nitrates ou de sulfure qui inhibent la prise du liant hydraulique ou de sulfates qui génèrent des gonflements), la société Eiffage propose une variante plus performante et plus « verte » : le retraitement à froid aux liants hydrauliques routiers (LHR) de la partie supérieure de la chaussée et d’un apport de fraisats d’enrobés issus de la déconstruction de la couche de roulement.

Pourquoi utiliser de nouveaux matériaux, qu’il faut acheminer à grands frais, alors que l’ancienne chaussée représente un excellent gisement de matériaux ? « Avec cette technique, tout est optimisé : pas de mise en décharge, pas d’exploitation inutile de carrières ou de ballastières, pas de transport, pas de vapeurs nocives… Le retraitement en place à froid aux liants hydrauliques routiers recycle les matériaux en place, économise l’énergie et respecte l’environnement », commente Guillaume Berlot, le chef d’agence Eiffage Route-Nord-Est, à Troyes.

Autre avantage décisif : la technique s’avère en général 15 à 30 % moins chère que les solutions classiques de renforcement. Dans le cas précis de la RD 7, l’économie avoisine les 20 %.

Quant au résultat, il est tout aussi performant qu’un « renforcement épais ». La chaussée ainsi traitée possède les mêmes qualités qu’une grave-ciment élaborée en centrale : rigidité, résistance au trafic, solidité, entretien quasiment nul sur la période de service… Enfin, la durabilité est remarquable : de l’ordre de vingt à vingt-cinq ans, la RD 7 ne faisant pas exception.

L’atelier de retraitement en action. Les bandes d’élargissement sont visibles de part et d’autre de la chaussée.
L’atelier de retraitement en action. Les bandes d’élargissement sont visibles de part et d’autre de la chaussée.

Objectifs

Ils consistent à engager quatre actions distinctes :

  • Réaliser la restructuration de la chaussée en ayant recours à la technique du retraitement en place au liant hydraulique routier (LHR). 
  • Profiter des travaux pour recalibrer la chaussée afin de la faire passer de 5,50 m de large à 6 m.
  • Réaliser un revêtement de chaussée de type ESU en couche de roulement.
  • Améliorer la tenue au gel de la structure.

LIANTS HYDRAULIQUES ROUTIERS : La chaussée ainsi traitée possède les mêmes qualités qu’une grave-ciment élaborée en centrale : rigidité,  résistance au trafic, solidité, entretien quasiment nul sur la période de service…

RECYCLAGE EN PLACE : Avec cette technique, tout est optimisé : pas de mise en décharge, pas d’exploitation inutile de carrières ou de ballastières, pas de transport, pas de vapeurs nocives…

 

Pourquoi utiliser de nouveaux matériaux, qu’il faut acheminer à grands frais, alors que l’ancienne chaussée représente un excellent gisement de matériaux ?

Mise en œuvre

Le chantier a été réalisé en suivant les opérations suivantes.

Réalisation des tranchées latérales

Les tranchées latérales (largeur 1,2 m et profondeur 0,5 m) ont été creusées de part et d’autre de la chaussée existante (cf. schéma 1), à l’aide d’une pelle mécanique, sur une longueur de 20 380 ml.

Elles sont réalisées en mordant de 40 cm sur les rives de la chaussée existante (cf. schéma 2). Elles sont ensuite comblées avec des matériaux d’apport en GNT 0/63, compactés en couches successives (cf. schéma 3). Cette opération a nécessité trois mois de travaux.

Apport des matériaux pour la restructuration de la chaussée

Il s’agit de fraisat d’enrobé qui est réparti à la surface de la chaussée existante sur une épaisseur de 0,13 m et une largeur de 6,20 m, couvrant la largeur de la chaussée existante et partiellement les tranchées latérales (cf. schéma 4).  Cet apport de matériaux a pour but d’augmenter l’épaisseur de la chaussée existante pour qu’elle soit en mesure, après retraitement, de supporter le trafic prévisible, attendu en hausse dans les années à venir. En outre, l’augmentation de l’épaisseur de la chaussée améliore la tenue au gel de la structure, située dans un département au climat hivernal rigoureux. 
La couche de fraisat d’enrobé a été réglée au profil au moyen d’une niveleuse guidée par GPS.

Particularité : Eiffage a proposé une solution permettant d’obtenir un matériau de type ERTALH (enrobés recyclés traités au liant hydraulique) comme matériau d’assise de chaussée. Son « comportement est mixte entre la grave-bitume (GB) et les matériaux traités aux liants hydrauliques (MTLH) », précise Laurent Creton, le directeur technique d’Eiffage.

L’épandeur à dosage pondéral assure la répartition homogène du liant hydraulique routier à raison de 26 kg au m².
L’épandeur à dosage pondéral assure la répartition homogène du liant hydraulique routier à raison de 26 kg au m².

Épandage du liant

Un épandeur à dosage pondéral asservi à la vitesse d’avancement a réparti le liant hydraulique routier fourni par Ciments Calcia, à raison de 26 kg au m2. Un contrôle régulier de l’épandage et de la quantité des liants a été réalisé par la méthode dite « à la bâche » (cf. schéma 5).

L’augmentation de l’épaisseur de la chaussée améliore la tenue au gel de la structure, située dans un département au climat hivernal rigoureux.

 

Malaxage et humidification

« Nous avons mis en œuvre notre atelier de retraitement exclusif ARC 1000, développé dans les ateliers Eiffage, commente Laurent Creton, le directeur technique d’Eiffage. Il est constitué d’un bâti sur chenilles qui comprend un rotor de 2 m de largeur, équipé de 224 dents, une lame flottante pour assurer le nivellement du fond de forme, un malaxeur, une vis de répartition et une lame de répandage. Au centre de l’engin, le puissant malaxeur de centrale assure une excellente homogénéité transversale et verticale du traitement. » Approvisionné par une citerne d’eau progressant à sa suite pour assurer l’humidification précise du mélange, l’ARC 1000 permet d’obtenir un coefficient HEPIL (pour Homogénéité du produit élaboré, Épaisseur = maîtrise et respect, Puissance de fraisage, Injection de liquide dans la cloche de malaxage, L = dosage du liant sous forme d’émulsion) optimal de 33333.

Comme indiqué précédemment, le retraitement s’est effectué sur une épaisseur de 25 cm à l’axe de la voie et jusqu’à 30 cm en rives pour conforter l’élargissement (+ 0,5 m par rapport à l’existant) et obtenir une structure parfaitement homogène (cf. schéma 6).

L’apport d’agrégats d’enrobés (AE), granulométrie : 0/63, a été réalisé sur une épaisseur de 13 cm sur l’ensemble de la chaussée. Ensuite, le retraitement au liant hydraulique routier sur une épaisseur de 25 cm à l’axe de la voie et jusqu’à 30 cm en rives a permis d’obtenir le matériau spécifique de type ERTALH. Exemple de formulation : 62 % d’enrobés recyclés + 33,5 % de matériaux correcteurs + 4,5 % de liant hydraulique routier.

Le directeur technique d’Eiffage poursuit : « Le bitume des AE, associé au liant hydraulique d’apport, permet une réduction d’épaisseur par rapport à une grave hydraulique et limite la fissuration. Les avantages sont nombreux : pouvoir structurel, insensibilité à l’orniérage, meilleur indice de qualité élastique, réduction du coût global de l’infrastructure, moins de déchets, moins de rotations de camions et donc préservation du réseau routier avoisinant, sécurité renforcée, durée des travaux écourtée, réduction des coûts… » Résultat : la valorisation de 8 200 m³ d’enrobés provenant des stocks du département, un nouveau point positif pour l’environnement.

 

 

Réalisation des bandes dérasées

De part et d’autre de la chaussée ont été réalisées en GNT 0/31,5 des bandes dérasées de largeur 0,45 m et d’épaisseur 0,13 m (cf. schéma 7).

FORMULES & DONNÉES 1 : L’ARC 1000 permet d’obtenir un coefficient HEPIL (pour Homogénéité du produit élaboré, Épaisseur = maîtrise et respect, Puissance de fraisage, Injection de liquide dans la cloche de malaxage, L = dosage du liant sous forme d’émulsion) optimal de 33333.

FORMULES & DONNÉES 2 : Le retraitement au liant hydraulique routier sur une épaisseur de 25 cm à l’axe de la voie et jusqu’à 30 cm en rives permet d’obtenir le matériau spécifique de type ERTALH. Exemple de formulation : 62 % d’enrobés recyclés + 33,5 % de matériaux correcteurs + 4,5 % de liant hydraulique routier.
 

Réglage et compactage

Immédiatement après le malaxage, un compacteur V4 intervient une première fois pour « refermer » le mélange ainsi obtenu. Après l’intervention d’une niveleuse qui effectue le réglage, six passes de compacteur V5 en grande amplitude permettent le compactage des 25 cm de matériaux traités. Un dernier réglage « recoupe », effectué par une seconde niveleuse, permet la mise au profil définitif et confère à la route un profil en travers régulier et un profil en long confortable pour l’usager. Deux passes de compacteur V5 en grande amplitude sont encore effectuées pour obtenir un compactage ql. « Il n’y a pas eu préfissuration, rendue inutile par l’utilisation d’une grave ERTALH », précise Guillaume Berlot, le chef d’agence Eiffage Route-Nord-Est, à Troyes.

 

 

Protection du matériau retraité

Une couche de protection a été appliquée sur la couche retraitée (sur une largeur de 6,20 m) afin de la protéger des intempéries, de l’évaporation de l’eau et du trafic de chantier. Après durcissement de la couche traitée au liant hydraulique routier, un enduit bicouche (10/14 – 4/6) à l’émulsion aux bitumes élastomères a été appliqué sur une largeur de 6 m afin de garantir la fonctionnalité de la chaussée (cf. schéma 8).

Bilan

Début juin 2019, la RD7 affichait sa nouvelle physionomie sur 10 km entre Saint-Flavy et la Belle Étoile.

« Je connaissais la technique à titre professionnel, car je suis ingénieur TP, mais je ne l’avais pas vue mise en œuvre, conclut Alain Balland, vice-président de conseil départemental de l’Aube, en charge des routes. Dans le cas particulier de la rénovation de la RD7, compte tenu de sa configuration et de ses dimensions, le retraitement en place à froid aux LHR représente la solution idéale : elle est économiquement avantageuse et, en plus, elle est respectueuse de l’environnement en permettant d’obtenir une voie neuve. C’est une belle réussite ! » 

 

L’ARC 1000 assure le malaxage du liant avec le fraisat d’enrobé et les matériaux de l’ancienne chaussée sur une profondeur de 25 cm (dans l’axe de la chaussée) et de 30 cm en rives. L’ajustement de la teneur en eau est apporté par injection directe dans la cloche de l’ARC 1000 grâce à une citerne d’eau.
L’ARC 1000 assure le malaxage du liant avec le fraisat d’enrobé et les matériaux de l’ancienne chaussée sur une profondeur de 25 cm (dans l’axe de la chaussée) et de 30 cm en rives. L’ajustement de la teneur en eau est apporté par injection directe dans la cloche de l’ARC 1000 grâce à une citerne d’eau.

Localiser la réalisation

Principaux intervenants

Maîtrise d’ouvrage : Département de l’Aube – Maîtrise d’œuvre : Département de l’Aube – Entreprise : Eiffage Route – Fournisseur du liant hydraulique routier : Ciments Calcia

En quelques chiffres

  • 62 000 m² revêtus.
  • 63 200 m² de surface totale retraitée.
  • 1 500 t de liant hydraulique routier utilisées.
  • 15 020 m³ de matériaux retraités, dont 8 200 m³ d’agrégats d’enrobés valorisés.
  • 16 000 t de ressources naturelles  économisées (notamment des agrégats naturels de carrières).

Liens utiles

Bibliographie

  • T 71 : L'entretien structurel des chaussées souples et semi-rigides. Le retraitement en place à froid aux liants hydrauliques, CIMbéton, 2013.
  • Guide technique : Retraitement en place à froid des anciennes chaussées, SETRA / LCPC, 2003.
  • T 58 et C 58 : Retraitement en place à froid des anciennes chaussées aux liants hydrauliques, CCTP-Type, CIMbéton, 2008.
  • En route vers le développement durable : L’entretien des chaussées en place aux liants hydrauliques, CIMbéton, 2013.
  • T 31 : Étude comparative en technique routièreRetraitement des chaussées en place vs renforcement. Méthode graphique de comparaison économique et environnementale, CIMbéton, 2010.


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