Situation

Située à une trentaine de kilomètres au nord de Marseille, Aix-en-Provence est une « ville de culture et d’innovation », berceau du fameux calisson et lieu de naissance du peintre Paul Cézanne. Particularité : avec un territoire de 18 608 hectares, c’est la onzième commune la plus vaste de France métropolitaine.

État des lieux

Du fait de cette importante superficie, le réseau routier communal est très étendu. Dans sa périphérie, Aix-en-Provence englobe plusieurs villages (Les Milles, Luynes, Puyricard, Célony, Couteron, Les Granettes, ainsi que des quartiers récents comme La Duranne). Dans ces secteurs, les voies de circulation sont d’anciens chemins agricoles, étroits, souvent vétustes. Ils sont constitués d’enduits superficiels ou d’enrobés pour la couche de surface, supportés par une couche d’assise de quelques centimètres de GNT et d’une couche de forme en « pierres de route » (cailloutis ou « casson », selon la technique dite « macadam »). Ils sont très fréquentés à cause de la densité de la population qui réside dans ces zones. Par ailleurs, en fin d’été et en automne, les orages parfois violents les rendent difficilement praticables, inondables et parfois dangereux. Étroites (d’une largeur inférieure ou égale à 3,50 m), souvent bordées par des fossés ou des murets, toutes les chaussées de ces voies (chemin de la Présidente, les Muses du Soleil, route du Puy-Sainte-Réparade) présentaient les mêmes types de dégradations : ornières, affaissements de rives, flaches, écaillage, fissures erratiques, fragmentations, faïençage, etc. (cf. schéma 1).

Projet

En 2017, la ville d’Aix-en-Provence a décidé de procéder à la réfection de vingt-six de ces chemins ruraux, soit environ 30 km de voirie. Secteurs concernés : Puyricard-Couteron-Célony-La Calade-Jas de Bouffan-Les Milles-Luynes. En outre, la conformation des chemins communaux aixois n’a pas permis d’envisager de les élargir. Il a été aussi jugé préférable, pour des raisons de sécurité, de maintenir certains passages étroits pour inciter les automobilistes à ralentir.
La mairie a lancé un appel d’offres (marché subséquent sur accord-cadre ouvert à variante environnementale) avec une solution de base classique (cf. schéma 2) qui consiste à :

  • Raboter les chaussées existantes sur 10 cm d’épaisseur.
  • Évacuer les matériaux en décharge.
  • Fabriquer, transporter et mettre en œuvre une couche de grave-bitume d’épaisseur 10 cm.
  • Fabriquer, transporter et mettre en œuvre une couche de surface en béton bitumineux d’épaisseur 5 cm.

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La solution retenue

Basée à Vitrolles, l’entité Méditerranée d’Eiffage Route postule à l’appel d’offres et propose une variante comportant une solution originale de retraitement des chaussées en place au liant hydraulique routier et une solution alternative à utiliser quand la solution de retraitement n’est pas envisageable.

Solution originale : le retraitement en place au liant hydraulique routier (LHR)

Elle utilise un engin spécifique et exclusif, mis au point par Eiffage Route, l’ARC 1000. Cette solution technique éprouvée, qui s’appuie sur des échantillonnages qui en confirment la faisabilité, présente de multiples avantages :

  • Pas de déchets ni d’évacuation des anciens matériaux de la chaussée.
  • Pas de nouveaux matériaux à apporter sur le chantier (excepté le liant, qui ne représente que 4 % de la composition de la nouvelle structure).
  • Réduction de la circulation des camions sur les routes qui mènent au chantier et qui ne sont pas forcément adaptées à un trafic de poids lourds.
  • Baisse des émissions de CO2, compte tenu du transport limité et de la technique à froid utilisée, qui ne nécessite pas de consommation d’énergie importante pour chauffer les enrobés.
  • Technique sobre du fait du recyclage des chaussées existantes, qui permet de ne pas consommer de granulats neufs (économie circulaire en lien avec la loi de transition énergétique).
  • Gain de temps (un phasage plus réduit, une durée des travaux optimisée).
  • Réduction de la gêne occasionnée aux usagers et aux riverains.
  • Pérennité de la nouvelle chaussée par le renforcement durable lié à la technique du retraitement en place au LHR.
  • Pertinence économique par rapport aux solutions traditionnelles.

Le retraitement en place au LHR est une solution technique éprouvée qui présente de multiples avantages, notamment la pertinence économique, par rapport aux solutions traditionnelles.

LIANTS HYDRAULIQUES ROUTIERS : Excepté le liant, qui ne représente que 4 % de la composition de la nouvelle structure, il n’est pas nécessaire d’apporter d’autres matériaux sur le chantier.

RECYCLAGE EN PLACE : Technique sobre du fait du recyclage des chaussées existantes, le retraitement en place au liant hydraulique routier permet de ne La technique du retraitement en place au LHR a permis d’éviter de mettre en décharge 11 500 m3 de matériaux et d’apporter sur place autant de matériaux neufs, ce qui correspond à environ 50 000 t de matériaux qui n’ont pas été générés, ni transportés, ni mis en œuvre.…

Solution alternative

Là où le retraitement en place de la chaussée n’est pas envisageable, notamment pour des raisons d’accessibilité (passages trop étroits) ou en présence d’affleurants multiples, Eiffage Route prévoit une autre solution, également intéressante du point de vue environnemental : le renforcement de la chaussée existante par la mise en œuvre de 9 cm d’une grave-émulsion fabriquée à froid, utilisant 100 % de matériaux recyclés avec un liant végétal issu de la sylviculture, la poix.

Dans un cas comme dans l’autre, les revêtements de surface contiendront de 30 à 40 % de matériaux recyclés.

Écologiquement et économiquement mieux-disante, cette variante est retenue par la Ville.

Avec la variante d’Eiffage, cette vaste opération prend une nouvelle physionomie, plus technologique et plus verte, en poursuivant simultanément plusieurs objectifs : rénovation, sécurisation, préservation et optimisation.

Objectifs

Avec la variante d’Eiffage, cette vaste opération de rénovation prend une nouvelle physionomie, plus technologique et plus verte, en poursuivant simultanément plusieurs objectifs :

  • Rénover efficacement et rapidement un réseau de voies communales anciennes.
  • Sécuriser et pérenniser les voies rénovées en s’assurant de leur durabilité, tout en améliorant leurs conditions de circulation.
  • Limiter les atteintes à l’environnement générées par cette intervention de grande dimension.
  • Optimiser le coût de l’opération, en réalisant d’importantes économies.

Mise en œuvre

Le chantier est lancé en septembre 2019.

 

 

Information des riverains

Les résidents concernés par ces travaux sont systématiquement informés soixante-douze heures à l’avance par les équipes techniques sur place. Durant cette période et sur chaque chemin visé, la circulation est interrompue en journée mais possible en dehors des heures de chantier. Les mairies annexes restent également à la disposition des résidents pour leur transmettre toutes les informations nécessaires.

Mise en œuvre de la solution de retraitement

Sur l’ensemble des voies concernées, le même scénario se reproduit au fil des semaines, l’ancienne chaussée étant considérée comme un gisement de matériaux à valoriser pour créer une nouvelle structure homogène.

L’ARC 1000, un engin spécifique et exclusif.
L’ARC 1000, un engin spécifique et exclusif.

Épandage du liant (cf. mémo technique en annexe)

Après vérification de l’humidification du matériau, le liant est épandu selon le dosage défini par l’étude du laboratoire (25 kg/m²). Cette opération est réalisée par un épandeur doté d’un système de dosage volumétrique asservi à la vitesse d’avancement (cf. schéma 3). Le liant hydraulique routier mis en œuvre est le LV-TS 13, fabriqué par Vicat dans son usine locale de Fos-sur-Mer.

À base de clinker, il permet une réouverture immédiate aux véhicules légers des riverains, puis aux poids lourds, après sa montée en résistance rapide. Les résultats des contrôles de portance réalisés à jeune âge (entre quatre et sept jours après traitement) ont permis d’évaluer la qualité de la plate-forme in fine à PF4 (EV2 > 200 MPa).

« Il faut souligner la remarquable coordination d’Eiffage avec Vicat, par le biais de sa filiale de transport SATM, pour desservir la multiplicité des points de livraison et leurs accès, précise-t-on chez Vicat. Cela donne tout son sens à l’intégration du transport de nos liants par une filiale dédiée. »
 

La chaussée est décohésionnée et malaxée.
La chaussée est décohésionnée et malaxée.

Consultez le mémo technique sur l’épandage en annexe.

Défragmentation et malaxage

Spécialement conçu pour ce type de travaux, l’ARC 1000 d’Eiffage Route entre ensuite en action. La puissance de l’engin (1 000 CV) assure à la fois un décohésionnement complet de la chaussée et un malaxage efficace en une seule passe. Les matériaux sont malaxés avec le LV-TS 13 sur une épaisseur de 32 cm. L’ARC 1000 est suivi par une citerne qui l’approvisionne en eau. L’humidification du matériau s’effectue directement dans la cloche de malaxage (cf. schéma 4).

Réglage et compactage

Le matériau obtenu est réglé selon le profil déterminé à l’aide d’une niveleuse. Il est ensuite compacté à l’aide d’un cylindre V4, puis d’un compacteur à pneus. Après compactage, le matériau est recouvert d’une couche d’enduit superficiel, assurant à la fois la protection du matériau retraité et autorisant la circulation des riverains dans de bonnes conditions.

La niveleuse, le cylindre V4 et le compacteur à pneus.
La niveleuse, le cylindre V4 et le compacteur à pneus.

Couche de roulement

Enfin, après un délai de quatre à sept jours, la surface retraitée est recouverte d’une couche de surface en béton bitumineux BBS 0/10 R30 (30 % recyclés), d’épaisseur 4 cm (cf. schéma 5).

Mise en œuvre de la solution de renforcement

Dans les zones difficiles d’accès pour l’atelier de retraitement, Eiffage a mis en œuvre une solution de renforcement en grave-émulsion, utilisant un liant innovant, comme alternative au bitume traditionnel, baptisé Recytal.

Adapté à un trafic faible à moyen (jusqu’à T2), ce nouveau type de matériau a été fabriqué à froid dans l’usine d’enrobage d’Istres, à partir des matériaux issus de la déconstruction d’anciennes chaussées et de poix, coproduit résineux issu de la sylviculture et de l’industrie papetière française. Il a été ensuite transporté sur le chantier et mis en œuvre sur une épaisseur de 9 cm, de manière traditionnelle avec un finisseur (cf. schéma 6).

Une couche de surface – constituée d’un BBTM 0/10 R30 (30 % recyclés) et d’épaisseur 2,50 cm – est réalisée sur la grave-émulsion. En tout, 4 000 m2 de renforcement avec Recytal ont été réalisés sur les chemins communaux d’Aix-en-Provence (cf. schéma 7).
 

Environ 2 000 transits de poids lourds supprimés

Au total, lors de ce chantier, 115 000 m² de chaussées ont été retraités en place. Sachant que le cahier des charges initial prévoyait un rabotage des chaussées sur 10 cm, avec évacuation des matériaux et réalisation de 10 cm de grave-bitume, la technique du retraitement en place au LHR a permis d’éviter de mettre en décharge 11 500 m3 de matériaux et d’apporter sur place autant de matériaux neufs, ce qui correspond à environ 50 000 tonnes de matériaux qui n’ont pas été générés, ni transportés, ni mis en œuvre. Ainsi, à raison de 25 tonnes de chargement par véhicule, on peut estimer qu’environ 2 000 transits de poids lourds ont été supprimés, ce qui a épargné les voies d’accès au chantier. Une équation au résultat positif, du point de vue tant environnemental qu’économique.

Le chantier s’est achevé en novembre 2019, après deux mois et demi de travaux.

FORMULES & DONNÉES : La technique du retraitement en place au LHR a permis d’éviter de mettre en décharge 11 500 m3 de matériaux et d’apporter sur place autant de matériaux neufs, ce qui correspond à environ 50 000 t de matériaux qui n’ont pas été générés, ni transportés, ni mis en œuvre.
  
FORMULES & DONNÉES : À raison de 25 t de chargement par véhicule, on peut estimer qu’environ 2 000 transits de poids lourds ont été supprimés, ce qui a épargné les voies d’accès au chantier. Une équation au résultat positif, du point de vue tant environnemental qu’économique.

Difficulté : l’étroitesse des voies (< 3,50 m).
Difficulté : l’étroitesse des voies (< 3,50 m).

Bilan

« Les solutions d’entretien mises en œuvre dans la commune d’Aix-en-Provence sont des solutions “bas carbone”, qui ont fait l’objet d’un calcul d’émissions de CO2 avec le logiciel SEVE. Par rapport à la solution de base, la diminution des émissions de CO2 est de 38 %, ce qui représente une économie de 650 tonnes en équivalent de CO2 », se félicite Eiffage Route.

Pour un coût global de voirie réduit de 30 %, le chantier des chemins communaux aixois est également parvenu à diminuer de façon optimale les émissions de gaz à effet de serre, notamment par la baisse significative des déplacements d’engins, rendue possible par la technique du retraitement en place au liant hydraulique routier. Autre bénéfice non négligeable : la méthodologie et la vitesse d’exécution de l’opération, qui ont permis de réduire de manière considérable les nuisances pour les riverains, engendrées habituellement sur un tel chantier. Tirant les enseignements de l’opération, Maryse Joissains-Masini, première magistrate d’Aix-en-Provence, résume ainsi son point de vue : « Quand je compare le coût de l’opération au coût initial et que je constate la quantité de CO2 économisée, je suis un maire heureux. »

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L’un des vingt-six chemins ruraux en cours de réfection. Au total, environ 30 km de voirie ont été rénovés dans les secteurs Puyricard-Couteron-Célony-La Calade-Jas de Bouffan-Les Milles et Luynes.
L’un des vingt-six chemins ruraux en cours de réfection. Au total, environ 30 km de voirie ont été rénovés dans les secteurs Puyricard-Couteron-Célony-La Calade-Jas de Bouffan-Les Milles et Luynes.

Localiser la réalisation

Principaux intervenants

Maîtrise d’ouvrage : Ville d’Aix-en-Provence – Maîtrise d’œuvre : Ville d’Aix-en-Provence – Entreprise : Eiffage Route (Vitrolles) – Fournisseur du liant hydraulique routier : Vicat

En quelques chiffres

  • 29 km de chemins communaux
  • 119 000 m² 
  • + de 2 500 tonnes de LHR Vicat LV-TS 13 fabriquées localement
  • 38 % d’émissions de CO2 en moins
  • soit 650 tonnes de CO2 économisées
  • 2,5 mois de travaux

Liens utiles

Bibliographie

  • T 71 : L'entretien structurel des chaussées souples et semi-rigides. Le retraitement en place à froid aux liants hydrauliques, CIMbéton, 2013.
  • Guide technique : Retraitement en place à froid des anciennes chaussées, SETRA / LCPC, 2003.
  • T 58 et C 58 : Retraitement en place à froid des anciennes chaussées aux liants hydrauliques, CCTP-Type, CIMbéton, 2008.
  • En route vers le développement durable : L’entretien des chaussées en place aux liants hydrauliques, CIMbéton, 2013.
  • T 31 : Étude comparative en technique routièreRetraitement des chaussées en place vs renforcement. Méthode graphique de comparaison économique et environnementale, CIMbéton, 2010.


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