Centre nautique et sportif de Gerland régénéré
En harmonie avec le site, le nouveau centre nautique et sportif de Gerland crée un pont temporel d’un siècle, valorisant un patrimoine et le projetant dans l’avenir.
Dans le sud de la ville de Lyon, dans un secteur dont l’occupation a connu de nombreux changements, la municipalité a initié en 2011 une vaste opération sur l’ensemble du site du stade de Gerland, inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques.
Propriétaire du site, la ville en a confié la maîtrise d’ouvrage et l’exploitation à LOU Rugby (Lyon olympique universitaire), assortie d’une obligation de travaux de transformation et de restauration. L’architecte Albert Constantin en assure la coordination.
C’est sur cette emprise que le nouveau centre nautique et sportif de Gerland, livré à l’été 2024 par l’agence 4_32 architecte dirigée par Claire Bertrand et Pierre-Benoît Thévenon, associée à RL&A Architectes pour la partie patrimoniale, prend place. Construit autour de la piscine historique, il accompagne l’esprit du lieu et lui confère une nouvelle modernité, tant d’un point de vue programmatique, qu’urbain et architectural.
Sur les traces du quartier des Athlètes
En 1913, le maire de Lyon Édouard Herriot confia la réalisation d’un « stade des sports athlétiques » à l’architecte et urbaniste Tony Garnier (1869-1948). Implanté dans un grand parc paysagé, l’aménagement imaginé composait avec un stade, un quartier des athlètes et un quartier des cyclistes ; seul le stade fut construit. Si le projet global fut abandonné en 1926, alors que les fondations des deux quartiers étaient réalisées, les nombreuses noyades dans le Rhône et la Saône incitèrent cependant à réaliser en 1932 une piscine olympique avec plongeoir bordée de gradins : l’une des premières piscines municipales de France. Partant de cet équipement emblématique, le nouveau stade nautique et sportif reprend le fil de l’histoire et offre une interprétation du quartier des athlètes un siècle plus tard.
Restauration patrimoniale de la piscine
La piscine extérieure d’origine présentait des désordres importants liés au vieillissement des bétons. Les diverses pathologies ont nécessité une restauration approfondie, à commencer par le décapage des revêtements récents et le nettoyage des bétons allant jusqu’à la mise à nu des armatures corrodées et un traitement par passivation. À l’aide d’un mortier respectant les caractéristiques de l’ancien béton et, par endroits, l’ajout de fibres carbone, les zones dégradées ont été réparées. Un inhibiteur de corrosion a été appliqué et un traitement associant une étanchéité liquide saupoudrée d’un mélange de silice et quartz a permis d’obtenir une finition dont la matière et la teinte rappellent les sables de Saône utilisés par Tony Garnier, à la fois plus simple à entretenir et plus pérenne que les mosaïques de couleur qu’elle remplace. Une finition similaire des plages a été obtenue grâce à des recherches sur les adjuvants et les granulats du béton.
Un nouveau bassin en béton recouvert d’une membrane en PVC armé a été construit à l’intérieur de celui d’origine, sa longueur passant de 50 à 45 m. Une galerie technique se glisse entre les deux. Afin de limiter la consommation d’eau et l’usage des produits chlorés, la profondeur a également été réduite de 5,40 m à 1,80 m, rendant caduc le plongeoir de 10 m, emblème de la piscine des années 1930, restauré et repeint en blanc.
Seuls deux vomitoires ménagés dans les gradins ont été ajoutés à ce bassin extérieur.
Articulation des volumes et programmes
De part et d’autre de la piscine historique, à l’arrière des gradins, s’étirent deux corps de bâtiment d’un étage sur 75 m de longueur et de 8,5 et 9 m de hauteur. L’aile est, plus étroite (13 m) afin de ne pas toucher aux arbres du parc sur lequel elle s’ouvre, est dédiée à l’entraînement des rugbymen professionnels –piste de course, terrain synthétique, espaces de vie et de soins, etc.
L’aile ouest, de 18 m de largeur, abrite un bassin d’apprentissage de natation de 25 m de longueur, visible depuis l’extérieur mais en retrait de la voie grâce à un jardin « qui intègre un système d’infiltration de 100 % des eaux pluviales », précise Olivier Mazet, chef de projet de l’agence 4_32 architecte, et des vestiaires. Elles sont articulées par deux volumes intermédiaires à un édifice de bureaux qui ferme la composition au sud et marque l’allée des Lions par sa hauteur (R+2) rendue imposante par la modénature de sa façade nord. Ces deux volumes, qui contrastent par leur aspect massif et opaque avec leurs voiles de béton toute hauteur, contiennent les circulations verticales et les sanitaires des bureaux et du centre de performance contribuant à la flexibilité de leur aménagement. L’ensemble forme ainsi un écrin-écran en U autour de l’ancienne piscine, jouant sur les volumes et les hauteurs de manière à dessiner un épannelage gradué. Ces extensions accusent cependant un léger retrait bienvenu vis-à-vis des usagers de la piscine, par les coursives-loggias équipées de garde-corps opaques sur la façade des bureaux ou émergeant en hauteur à l’arrière des gradins.
Jeu de portiques en béton et de transparence
L’assise du centre reprend les fondations construites par Tony Garnier. « Nous avons dédoublé la trame et l’avons décalée afin de ne pas peser sur les fondations en béton de graviers conservées à titre de vestiges, expliquent les architectes. Trois idées fortes ont guidé la conception architecturale. La verticalité en jouant sur l’allée des platanes. La monumentalité voulue par Tony Garnier, marquée notamment par les portiques monumentaux en béton brut de la façade nord qui rythment l’entrée du stade sur l’allée des Lions. Le jeu des transparences qui laisse entrevoir l’activité du centre, notamment la piscine couverte, fermée sur l’extérieur par des murs-rideaux vitrés, de même que la salle d’entraînement. » L’emploi du béton comme matériau d’expression architecturale, ici d’une élégante modernité, s’accorde au projet d’origine et contribue à la cohérence du projet à l’échelle du site autant qu’aux exigences de pérennité et de résistance à un environnement agressif, humide et chloré. La trame régulière des façades est marquée par les portiques dont la profondeur varie de 40 cm à 1 m en fonction des usages et des orientations : brise-soleil au sud, murs-rideaux côté jardin. Leur variation de hauteur trouble la perception des niveaux et facilite la gestion des différents volumes intérieurs comme l’intégration des locaux techniques en toiture.
L’intégralité des portiques – poteaux, poutres, casquettes – et des loggias ont été préfabriqués contrairement aux murs pignons et refends coulés en place. Dans les extensions, les éléments de structure en béton sont associés à des poutres métalliques qui franchissent les portées : un choix dicté par l’urgence du chantier qui n’a duré que 22 mois. Toujours dans cette recherche d’une simplicité apparente et d’une cohérence du bâti, le béton est d’une même teinte gris claire quelle que soit sa mise en œuvre, il fait le lien entre l’ancien et le nouveau, l’histoire et le contemporain.
Qualités environnementales : RT 2012, CEP - 40 %, BBio - 20 %.
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Reportage photo : © Vladimir de Mollerat du Jeu
Fiche technique
- Maître d’ouvrage : LOU Rugby
- Maître d’ouvrage délégué : Foncière Polygone
- Maîtres d’œuvre : 4_32 architecte ; RL&A Architectes (patrimoine)
- BE : Iliade Ingénierie (structure, fluides) ; Ateliers de l’éclairage (lumière)
- Entreprises : Fontanel (gros œuvre) ; IDbat Production (préfabrication) ; Freyssinet (restauration structurelle et étanchéité)
- Surface : 5 910 m2 SDP
- Coût : 18,2 M€ HT
- Programme : réhabilitation et extension : 2 bassins, espace de bien-être et fitness, bureaux, centre de performance des professionnels.
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Strasbourg
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