La façade sur le boulevard est animée par le calepinage des panneaux préfabriqués en béton matricé et les grands reliefs sculptés évoquant la taille-douce d’un timbre à grande échelle.

Le musée de La Poste a été inauguré le 4 juin 1946 dans l’hôtel de Choiseul-Praslin au 4, rue Saint-Romain, dans le 6e arrondissement de Paris. Au fil des années, l’hôtel particulier s’est avéré trop exigu et inadapté à l’enrichissement des collections, ainsi qu’à l’évolution des besoins et des usages. Un bâtiment neuf est construit sur 1 500 m2 au 34, boulevard de Vaugirard, dans le quartier de la gare Montparnasse. Il ouvre ses portes au public, après son inauguration le 18 décembre 1973, par le ministre des PTT, monsieur Hubert Germain. Cependant, plus d’une trentaine d’années plus tard, accessibilité des lieux, lumières, espaces, potentiel scénographique et muséographique ne répondent plus aux caractéristiques d’un musée contemporain. La décision de procéder à une transformation complète du bâtiment d’origine est prise. Une consultation européenne est lancée, en 2012, par Poste Immo, filiale immobilière du groupe La Poste. Ainsi, La Poste affirme son engagement et son attachement à son musée d’entreprise en investissant dans la réfection et la muséographie de l’immeuble patrimonial, dans lequel il est installé depuis 1973. Le musée de La Poste retrace l’histoire de la transformation d’une institution multiséculaire au service des Français, d’abord administration, puis établissement public et désormais entreprise publique détenue par l’État et la Caisse des dépôts. Depuis 2002, il bénéficie de l’appellation Musée de France. Il gère une collection patrimoniale, postale et philatélique appartenant à l’État.

Au rez-de-chaussée, de grandes parois vitrées ouvrent l’accueil du musée, les expositions temporaires et la boutique sur le boulevard et l’espace public.

Créer avec l’existant

À l’issue de la consultation lancée par Poste Immo, l’Atelier Jung Architectures est choisi pour concevoir le projet architectural et muséographique du musée de La Poste. La volonté du maître d’ouvrage était pour cette réalisation de lier, dès l’origine, l’architecture conçue par Frédéric Jung et la muséographie imaginée par Claudine Dreyfus. Cette agence a en effet souvent travaillé sur des reconversions de bâtiments anciens à fortes caractéristiques patrimoniales et des programmes d’équipements culturels intégrant d’importantes problématiques scénographiques ou muséographiques.

La façade nord ouvre le musée sur le paysage parisien et la lumière. Sa structure d’origine est révélée, réinterprétée et mise en valeur par de grands châssis vitrés verticaux ou des panneaux métalliques.

Le bâtiment existant est de l’architecte André Chatelin, Grand Prix de Rome. Il est caractéristique de l’architecture des années 1970, avec sa façade (sud), sur le boulevard, presque totalement aveugle, animée par le calepinage des panneaux préfabriqués en béton matricé et les grands reliefs du sculpteur Robert Juvin. À partir d’éléments en béton moulé de petite dimension réalisés avec du ciment blanc, des granulats de sable de Loire et de quartz, les panneaux en relief imaginés par le sculpteur sont l’évocation de la taille-douce d’un timbre à grande échelle – les dentelures se fondant dans les cannelures de la façade. Cette dernière affiche la présence et l’identité de l’institution dans la ville. Elle fait, aujourd’hui, partie du paysage urbain du quartier de la gare Montparnasse. Le parcours muséographique proposé par André Chatelin est une autre spécificité de son projet. Inspiré du musée Guggenheim de Frank Lloyd Wright à New York, il conduit en spirale descendante le public, par 16 quarts de plateau, depuis le 4e niveau jusqu’au rez-de-chaussée.

Vue sur la galerie d’accueil au rez-de-chaussée.

Autour d’un vide central

« Le projet propose d’intervenir essentiellement par une restructuration importante à l’intérieur du bâtiment et de la volumétrie d’origine, tout en respectant les intentions d’André Chatelin. L’objectif est de restructurer le bâti existant afin d’en faire un outil muséographique simple et rationnel. La proposition s’appuie sur les pérennités du bâti qui constituent les ancrages du projet. Il va s’installer dans ce « déjà là » en tirant sa force de l’expression du béton architectonique, de l’organisation du parcours muséographique ou de la révélation de « l’extrados » des sculptures de Juvin dans les salles de présentation des collections. Notre proposition assume un bâtiment Janus : fermé au sud sur le boulevard avec le maintien du « masque » de la façade d’origine et au nord avec une façade ouverte sur la tour Eiffel et réinventée à partir de la structure originale existante. L’organisation nouvelle du musée tourne autour d’un vide central qui traverse les espaces d’exposition permanente », souligne Frédéric Jung.

L’organisation nouvelle du musée tourne autour d’un vide central qui traverse les espaces d’exposition permanente.

Ce grand vide vertical se développe sur une vingtaine de mètres de hauteur. Sur la façade nord, de grandes baies vitrées l’ouvrent à la lumière et à la ville. De curieux objets flottent dans l’espace. Chacune de ces créations artistiques en suspension évoque un moyen de transport de La Poste, sur terre, dans l’air et sur l’eau. Du rez-de-chaussée au 4e étage, cet espace référent, véritable cœur de l’édifice, met les visiteurs et utilisateurs en contact visuel avec les collections permanentes en tout point du musée. Les volées d’escalier, qui se déploient au bord du vide, comme les ascenseurs panoramiques proposent des parcours qui révèlent les collections. 

Les volées d’escalier, qui se déploient au bord du vide, mettent en scène les parcours entre les collections.

Le rez-de-chaussée est dédié à l’accueil des visiteurs, aux expositions temporaires et aux ateliers pédagogiques. La boutique est installée au 1er étage en mezzanine sur le hall d’entrée. Du 2e au 4e étage, l’exposition permanente des collections prend place sur trois plateaux libérés des cloisonnements et des gaines, reprenant l’organisation des parcours pensés par l’architecte d’origine. Les bureaux administratifs se trouvent aux 5e et 6e étages. Enfin, au 7e étage, viennent l’auditorium et l’espace de réception, qui bénéficie au nord d’une vue panoramique sur la ville.

 

La façade sur le boulevard est peu modifiée. Elle est restaurée et retrouve son ton pierre d’origine. Seule sa partie basse est remaniée et plus généreusement vitrée. Cela permet de révéler toute la profondeur du nouveau socle public depuis le trottoir et d’ouvrir à l’espace public les expositions temporaires, ainsi que la boutique. La façade nord, invisible depuis la rue, a fait l’objet d’une intervention plus lourde. Vidée de ses remplissages maçonnés, la structure en béton armé d’origine est révélée et réinterprétée. Elle est découpée à certains endroits. Les baies libérées dans la nouvelle trame de la structure sont remplies soit par de grands châssis vitrés verticaux, soit par des panneaux sandwichs présentant une vêture métallique grise. Le projet répond aux exigences de la certification HQE Rénovation et de la labellisation « Accessibilité ».

Des plateaux unitaires ont été réalisés afin de créer un outil muséographique simple, rationnel, offrant des espaces généreux et adaptés aux évolutions.

Localiser la réalisation

Fiche technique

Reportage photos : Hervé ABBADIE

Maître d’ouvrage : Poste Immo 
Maîtrise d’œuvre : Jung Architectures, architecte et scénographe, mandataire commun (Frédéric Jung, architecte, Fabrice Malburny, architecte, chef de projet, Claudine Dreyfus, architecte, chef de projet scénographe ; Isabelle Devin, architecte, scénographe) – CALQ, maîtrise d’œuvre d’exécution
BET (structure) : Khephren
Entreprise (gros œuvre, étanchéité, menuiseries extérieures) : CBC & Dumez 
Surface : 5 200 m² SDP 
Coût : 20,5 M€

Programme : rénovation et extension du musée dans son bâtiment d'origine. Restructuration lourde du musée, création d’un espace référent à l’échelle des collections, extensions, nouveau projet muséographique et scénographique. 



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