de nuit, les éclairages par Led renforcent la singularité de la silhouette de la tour.

L’opération Allure fait partie des constructions de la seconde phase de réalisation de la zone d’aménagement concerté (Zac) Clichy-Batignolles dans le 17e arrondissement de Paris. L’ensemble de la Zac, initiée au début des années 2000, s’étend sur une emprise de 54 hectares jusque-là occupés par des activités ferroviaires. Le projet s’organise de part et d’autre d’un grand parc de 10 hectares avec comme figure de proue, au nord, le nouveau tribunal de grande instance de Paris (Renzo Piano Building Workshop architecte). 

Dans le secteur ouest, compris entre le parc Martin Luther King et le faisceau ferroviaire de la gare Saint-Lazare, 1 500 logements (soit autant que dans la première phase du secteur est) côtoieront des immeubles de bureaux, une résidence pour étudiants et jeunes travailleurs, ainsi que des équipements comme une crèche, une école maternelle et un gymnase public. Construit sur une dalle à 10 m au-dessus du sol qui contient des locaux de la SNCF, il est traversé sur toute sa longueur nord-sud par la nouvelle rue Mstislav Rostropovitch qui relie la rue Cardinet à l’allée Colette Heilbronner et plus loin au boulevard Berthier. Un pont et une passerelle franchissent les voies de chemin de fer reliant cette nouvelle butte des Batignolles au quartier Saussure. 

La forme des balcons rappelle celle triangulaire de la parcelle.
La forme des balcons rappelle celle triangulaire de la parcelle.

Deux duos pour une opération dans un quartier concerté

Conformément à la méthodologie mise en place dans le cadre de l’atelier Batignolles, la conception de l’opération Allure a été portée pas deux maîtres d’ouvrage et deux agences d’architecture associées. L’atelier réunissait, toutes les semaines pendant les deux premiers mois puis tous les quinze jours jusqu’au dépôt du permis de construire, l’ensemble des maîtres d’ouvrage des différents lots de la Zac, aux côtés des maîtres d’œuvre, avec des représentants de la ville, de l’aménageur et de la maîtrise d’œuvre urbaine. La réflexion collective ainsi élaborée, enrichie de celle menée dans le cadre d’ateliers citoyens, visait à créer une cohérence forte entre les projets du même secteur. Le dessein d’ensemble s’inscrit non seulement dans le respect du plan Climat de la ville de Paris, mais aussi d’un cahier des charges environnemental ambitieux. 

Comme le souligne Julien Faure, architecte chef de projet de l’agence Fresh, mandataire de l’opération : « Les performances thermiques et acoustiques, la qualité de l’air intérieur, l’apport solaire quotidien – 2 heures de soleil direct minimum – furent des paramètres déterminants des choix opérés tant pour les matériaux que pour le système constructif et le parti architectural. La résolution des contraintes se fait sur l’ensemble des bâtiments. »

La disposition décalée des balcons préserve l’intimité des appartements.
La disposition décalée des balcons préserve l’intimité des appartements.

Une gradation d’échelles

L’opération Allure se distingue par sa façade en éventail qui se déploie le long de la rue Mstislav Rostropovitch, évoquant les pliages d’un origami. En réalité, ce sont trois plots distincts et imbriqués qui se répartissent sur la parcelle de forme triangulaire dont la gradation d’échelles permet de bénéficier du soleil, de ménager les vues, de ne pas obstruer celles des bureaux situés de l’autre côté de la voie et d’accompagner le dénivelé du site ; 9 m de hauteur séparent le niveau du parc de celui de la rue. Un plot de 9 maisons de ville de 3 niveaux joue du dénivelé avec un accès par le bas depuis le parc ou depuis le haut par la rue. Leurs volumes découpés permettent de deviner les unités de logement qui superposent des duplex de 4 ou 5 pièces, et d’offrir des espaces extérieurs privés. Un immeuble de 7 étages dont les angles sont creusés par des loggias et une tour de 15 étages contiennent des appartements de 1 à 5 pièces. Les logements en location à loyer maîtrisé occupent 5 maisons, l’immeuble en brique et les 5 premiers niveaux de la tour ; les autres sont en accession libre.

À l’articulation des trois entités, au premier étage, une grande terrasse commune aménagée avec une cuisine extérieure, une kitchen club, donne en balcon vers le jardin Martin Luther King. Attenant à cette terrasse, un studio partagé sert aussi bien à recevoir des proches de passage qu’à l’accueil d’une réunion ou de temps de coworking. Une petite buanderie est également à la disposition des habitants. Une conciergerie, qui dispose d’une loge et d’une application dédiée, gère ces différents espaces communs. En cœur d’îlot, un jardin planté d’arbres s’offre à l’usage de tous les habitants : un lieu privé où ils peuvent librement se croiser et bénéficier d’un peu de fraîcheur. 

La modénature du béton joue avec la lumière.
La modénature du béton joue avec la lumière.

Élément phare de l’opération, la tour culmine à près de 50 m de hauteur à l’angle de la rue et du parc, évitant tout juste la qualification contraignante d’un immeuble de grande hauteur (IGH). En transparence sur le parc, son rez-de-chaussée est réservé à un commerce de bouche. Elle est singularisée par des façades en panneaux sandwich préfabriqués en béton, matricé avec un effet moiré de teinte pierre qui tranche avec le revêtement de teinte foncée donnée par le parement en brique des volumes de moindre hauteur, clin d’œil aux habitations bon marché (HBM) du début du XXe siècle. 

« Nous souhaitions marquer la pointe par une écriture minérale qui rappelle la pierre blanche de Paris », précise l’architecte associée Ingrid Taillandier. Les menuiseries extérieures et les éléments de serrurerie – en aluminium couleur champagne – créent, à l’inverse, une continuité discrète d’un bâtiment à l’autre. Traversants ou bénéficiant de double ou triple orientation, la plupart des appartements se prolongent à l’extérieur en façades est et ouest par un grand balcon allant jusqu’à 2,8 m de profondeur et 13 m2 de surface, éclairant les séjours et s’ouvrant sur le paysage. La disposition en quinconce de ces espaces extérieurs assure l’intimité de chacun tout en autorisant de grandes baies vitrées en partie protégées par une grille verticale. Leur forme triangulaire s’accorde à celle de la parcelle et crée l’effet de pliage. Dans les façades planes nord et sud, composées de panneaux en béton matricé de fines rayures verticales qui font vibrer la lumière, de grandes baies aquarium ouvrent les séjours qu’elles éclairent au paysage ; la profondeur de leur encadrement offre une assise idéale pour en profiter.

La grande baie « aquarium » plonge le séjour dans le paysage.
La grande baie « aquarium » plonge le séjour dans le paysage.

Allier technique et esthétique

Dès le démarrage du projet, l’idée de recourir à un procédé de préfabrication structurelle et isolante en béton s’est imposée pour le bâtiment haut. Le choix s’est porté sur un mur à coffrage et isolation intégrée (MCII) qui a nécessité un avis technique car encore jamais utilisé pour une tour d’habitation. Il permettait de maîtriser les délais de construction, d’assurer une isolation thermique comme acoustique efficace et de maîtriser les coûts. Enfin, sa finesse représente un gain de surface. La mise au point pour le projet, distingué par une mention spéciale du prix Duo@work 2018 qui récompense un partenariat remarquable entre recherche architecturale et création industrielle innovante, s’est faite en étroite collaboration avec l’entreprise Jousselin Préfabrication. 

Les balcons prolongent les séjours très généreusement vitrés. de jour comme de nuit, les balcons offrent un rapport immédiat à la ville et au ciel.
Les balcons prolongent les séjours très généreusement vitrés. de jour comme de nuit, les balcons offrent un rapport immédiat à la ville et au ciel.

Les grands panneaux de 6 x 4 m, de 37 à 42 cm d’épaisseur (plus fins en hauteur) se composent d’un isolant de polyuréthane accolé au parement extérieur en béton et séparé par un vide de la paroi intérieure. Dans ce vide est coulé en place le béton qui rigidifie l’ensemble. Outre les façades, la structure associe deux murs de refends et des planchers dont les armatures ont été légèrement renforcées afin de supporter les balcons en porte-à-faux qui s’y raccrochent. Ces balcons sont des dalles préfabriquées en béton gris teinté dans la masse, rappelant également une couleur de pierre. Des percements dans les murs porteurs et des cloisons fusibles assurent une certaine modularité dans les aménagements intérieurs, voire le regroupement d’appartements.

Grâce à la réflexion poussée en amont et la préfabrication partielle de l’opération, elle a pu être livrée en avance par rapport aux estimations initiales.

Les balcons prolongent les séjours très généreusement vitrés. de jour comme de nuit, les balcons offrent un rapport immédiat à la ville et au ciel.
Les balcons prolongent les séjours très généreusement vitrés. de jour comme de nuit, les balcons offrent un rapport immédiat à la ville et au ciel.

Principaux Intervenants 

Auteur : Ève Jouannais – Reportage photos : David Foessel

Maître d’ouvrage : Ogic, Demathieu Bard Immobilier – Maître d’œuvre : Fresh Architectures (mandataire) et Itar Architectures (associé) ; Julien Faure et Oriane du Chéné, chefs de projet – Paysagiste : Base paysagistes – Aménageur : Paris-Batignolles-Aménagement – BET structure : CET (conception) – Entreprise générale : Demathieu Bard bâtiment IDF – Préfabricants : Jousselin (panneaux de façade), Hanny (dalles de balcon) – Surface : 8 492 m2 SDP, 1 642 m2 (terrain) – Coût : 18,1 M€ HT – Programme : 121 logements, 65 appartements en accession libre avec parkings et caves, 55 appartements en location à loyer maîtrisé, 3 espaces de vie partagés (1 studio « chambre d’hôtes », 1 terrasse kitchen club, 1 buanderie), 109 places de parking en sous-sol, 2 commerces. 



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