La finesse de l’écriture architecturale est due  à la corres- pondance parfaite entre le traitement des parties pleines en béton matricé à bandes verticales et celui des lames préfabriquées formant les claustras.

L’espace Guy Môquet est un équipement mixte regroupant un centre de loisirs, une salle de danse et de l’hébergement collectif. À la périphérie de Perpignan, la ville de Cabestany a bénéficié ces dernières années d’une forte croissance urbaine qui justifie la construction d’un équipement municipal pour les jeunes. Le maire, monsieur Jean Vila, souhaitait en effet pouvoir offrir un lieu valorisant et attractif où les jeunes de 11 à 25 ans pourraient non seulement se divertir, mais aussi s’orienter ou être épaulés dans leur projet. 

Le terrain d’implantation se positionne sur l’une des entrées de la ville, à proximité de la mairie, et en contact direct avec le vaste parking du centre culturel voisin. Il est bordé à l’ouest par un bassin d’orage, un peu délaissé jusqu’alors. 

La salle de danse profite d’une large vue sur le paysage.
La salle de danse profite d’une large vue sur le paysage.

Offrir des espaces extérieurs

Compte tenu de la taille du terrain, l’idée des concepteurs est de limiter le plus possible l’emprise au sol du bâti pour préserver des espaces extérieurs attractifs et généreux. « Pour ce faire, il a fallu gagner de la hauteur », confie Coralie Bouscal, l’associée en charge du projet au sein de l’agence toulousaine Oeco. Elle poursuit : « Nous avons pris le parti de superposer les différents éléments de programme et d’organiser un porte-à-faux partiel au-dessus du bassin. Ce faisant, nous avons pu dégager un vaste parvis public qui accueille les utilisateurs au droit de l’entrée principale et un espace extérieur en continuité du centre de loisirs. L’ambition que nous nous étions fixée était d’attirer les jeunes vers ce nouveau lieu qui leur est destiné, le lien des espaces avec l’extérieur était pour nous un des facteurs d’attractivité. »

À l’intérieur, la présence du béton assure pérennité et confort.
À l’intérieur, la présence du béton assure pérennité et confort.

Autre élément important dans cette organisation en strates successives : la pente générale du terrain d’est en ouest qui a permis d’organiser le rez-de-chaussée puis les autres niveaux avec un jeu de demi-niveaux qui avait l’avantage de limiter la hauteur totale du bâti malgré le parti pris d’empilement développé par les maîtres d’œuvre.

Les différents niveaux reçoivent les différentes activités tout en restant reliés entre eux par un vaste escalier central à l’image d’un atrium. On se voit entre les salles d’activité, il n’y a pas de rupture. L’ambiance intérieure est à la fois fluide et intense, comme dans une petite ruche. 

À l’intérieur, la présence du béton assure pérennité et confort.
À l’intérieur, la présence du béton assure pérennité et confort.

Des accès indépendants

L’équipement est un espace polyvalent constitué de trois entités qui doivent pouvoir fonctionner à des horaires décalés. En complément de la circulation verticale intérieure, un principe de coursives et d’escaliers extérieurs assure la parfaite autonomie des différents pôles.

La salle de danse, l’hébergement ainsi que la mission locale jeunes restent ainsi accessibles en dehors des horaires d’ouverture du centre de loisirs. 

Avec ces trois entités, ce sont six demi-niveaux que totalise l’équipement. L’espace jeunesse se déploie sur les trois demi-niveaux inférieurs. Les architectes ont souhaité définir ce lieu comme un « open space recloisonnable et modulable en fonction des besoins, support d’activités multiples et en parfaite continuité des espaces extérieurs ». Il s’organise autour du hall, qui fonctionne comme le cœur de l’équipement sur lequel s’ouvrent les différents espaces.

Les lames béton des claustras, réalisées en préfabrication foraine, permettent de créer une enveloppe continue qui intègre les espaces de circulation à la volumétrie générale.
Les lames béton des claustras, réalisées en préfabrication foraine, permettent de créer une enveloppe continue qui intègre les espaces de circulation à la volumétrie générale.

Au quatrième demi-niveau, s’implante la salle de danse, accessible soit par le hall, soit par la coursive extérieure. Elle bénéficie d’une douce lumière du nord, au travers d’une vaste fenêtre traitée en grand cadre ouvert vers le paysage. Depuis l’extérieur, il devient de nuit un signal poétique de la présence de ce nouvel équipement dans la ville. Implanté sur les deux derniers demi-niveaux, l’hébergement collectif, constitué d’une vaste salle commune et de six dortoirs, domine et contemple le Canigou. Les conceptrices ont imaginé le lieu comme une « grande maison pour les jeunes de passage ou les artistes en résidence ». Tous peuvent profiter d’une terrasse exceptionnelle en continuité de la salle commune : 200 m2 plein sud, abritée de la tramontane avec vue sur les toits des bâtiments voisins et le pic du Canigou en arrière-plan. On imagine aisément que cette terrasse en continuité de la salle à manger sera le point de rencontre favori des jeunes résidents.

Compte tenu de la taille du terrain et pour préserver devant l’entrée principale un vaste parvis, l’équipement est organisé  en hauteur.
Compte tenu de la taille du terrain et pour préserver devant l’entrée principale un vaste parvis, l’équipement est organisé en hauteur.

Harmonie et contraste 

L’insertion du bâtiment dans le site est subtile : le projet, sans être démonstratif, est reconnaissable par sa forme prismatique et sa matérialité. Les architectes, par le travail délicat des doubles niveaux, sont arrivées à limiter l’échelle volumétrique générale des 1 620 m2 de surface de plancher de l’équipement tout en créant une transition entre l’échelle pavillonnaire au nord/ouest et le centre culturel Jean Ferrat au sud/est.  

La volumétrie de base du projet est un rectangle compact que les conceptrices ont souhaité adapter en le faisant partiellement pivoter pour, d’une part, se protéger au mieux du vent dominant, véritable nuisance ici, tout en offrant, d’autre part, une façade principale le long de l’avenue du 19 Mars 1962. Il en résulte une volumétrie prismatique, à facettes, à l’image d’un cristal de roche.

Pour renforcer l’image d’un cristal de roche équarrie, le bâtiment a été réalisé avec comme unique matériau  le béton.
Pour renforcer l’image d’un cristal de roche équarrie, le bâtiment a été réalisé avec comme unique matériau le béton.

Matière et lumière

Pour conserver cette image de roche équarrie, le bâtiment a été réalisé avec comme unique matériau le béton. Il joue l’intégration par son écriture abstraite et relativement massive. L’enveloppe est continue, intégrant les espaces extérieurs de desserte aux volumes bâtis par la mise en œuvre de grands claustras de béton.

Coralie Bouscal explique : « Nous avons imaginé le volume comme un monolithe stylisé en béton de teinte claire. L’équipement est bâti avec ce seul et même matériau. Il est décliné en façades, en brise-soleil extérieurs, en parois et en dalles intérieures pour bénéficier de locaux robustes et confortables. Le tout constitue un ensemble homogène grâce au traitement de la surface du parement extérieur en béton dont le rythme est calé sur l’épaisseur des lames formant claustras. »

La sophistication du bâtiment est due à cette correspondance parfaite entre le traitement des parties bâties en béton matricé à bandes verticales et celui des claustras de béton qui reprennent la largeur des joints creux qui animent les murs opaques. 

La façade nord est animée de percements traités comme des cadres de taille aléatoire.
La façade nord est animée de percements traités comme des cadres de taille aléatoire.

Préfabriquées, ces lames ont été parfaitement mises en œuvre. Posées en dévers pour masquer le porte-à-faux au-dessus du bassin de rétention ou verticalement quand elles sécurisent la coursive extérieure, elles s’élancent vers le ciel et créent des jeux changeants d’ombres et de lumière. La teinte du béton se rapproche de la pierre naturelle et a été mise au point par l’utilisation d’agrégats de pierres locales. L’ensemble s’intègre, étonnament, parfaitement harmonieusement dans un environnement majoritairement constitué de briques et de tuiles canal.

De nuit, compte tenu de l’éclairage intérieur, le bâtiment devient un signal poétique dans le paysage de la ville.
De nuit, compte tenu de l’éclairage intérieur, le bâtiment devient un signal poétique dans le paysage de la ville.

À l’intérieur, la présence du béton assure pérennité et confort à des espaces parfois mis à rude épreuve. Les dalles intérieures ont permis de mettre en place un plancher chauffant/rafraîchissant qui tire parti de l’inertie du béton pour apporter une douce chaleur l’hiver ou au contraire une agréable fraîcheur l’été.  

Le soin apporté aux détails à l’intérieur comme à l’extérieur offre à l’ensemble une écriture contemporaine, dynamique et accueillante pour ses jeunes utilisateurs, belle réussite pour les architectes.

Principaux intervenants 

 Reportage photos : Kevin DOMAIRE

Maître d’ouvrage : ville de Cabestany – Maître d’œuvre : Oeco architectes – BET structure : BE TCE TPFI – Acousticien : Emacoustic – Entreprise gros œuvre : Fondeville – Surface : 1 620 m2 SDP – Coût : 2,8 M€ HT – Programme : centre de loisirs, salle de danse, hébergement collectif.



0 commentaires
CAPTCHA
Voir aussi
  • Compte-rendu
    Conférence. Béton, brutalisme vs délicatesse
    PARIS. 14 février. Manuelle Gautrand, architecte, a animé une conférence sur le thème "Béton, brutalisme vs délicatesse" dans le cadre de la soirée de lancement de la 8e édition du Trophée béton Écoles à la Maison de l'architecture en IdF.
  • SOLUTIONS BÉTON
    Rénovation, extension, surélévation
    Que ce soit pour des raisons sociales, environnementales, économiques, la rénovation occupe une part croissante dans la construction de la ville qui se renouvelle sur elle-même afin de répondre à un besoin de compacité incontournable. 
  • Lézignan-Corbières
    Collège 600 Rosa Parks
    Conçu par l’agence BPA, le collège présente sa silhouette longiligne au cœur d’un quartier en plein essor. Plusieurs éléments architecturaux singuliers le distinguent de l’archétype du collège.