Sa réalisation est l’aboutissement d’une élaboration longue et complexe, nécessitant un enchaînement de choix. Le choix du tracé, d'abord, est essentiellement poli- tique et économique. Il devra assurer certaines liaisons et permettre les échanges. Il en résultera un trafic de véhicules que la route devra pouvoir supporter. En fonction de ce trafic et des caractéristiques des sols rencontrés, plusieurs solutions tech- niques pourront être proposées pour la structure de la chaussée. Une analyse multi-critère (technique, économique, environnementale, etc.) permettra de déterminer la solution la mieux adaptée.

Les aspects techniques porteront sur le choix de la structure proprement dite, des matériaux (liants, granulats, etc.) et des différentes couches constituant la chaussée.
Les aspects économiques porteront sur le coût de l’investissement mais aussi sur son coût d’usage et d’entretien pendant une période de service donnée. Les aspects environnementaux porteront sur l'analyse du cycle de vie de l'ouvrage (du berceau jusqu'à la tombe).

Il s’agira en fait d’établir un véritable bilan prévisionnel (technique, économique et environnemental) pour chaque solution technique envisagée. Longtemps, cela n’était pas pratique courante aussi bien pour des raisons techniques qu’administratives ; mais l’élargissement de l’éventail des solutions béton associé à la préoccupation, de plus en plus marquée de la part des élus et des administrations, de rigueur dans les choix techniques, de bonne gestion et de respect de l'environnement, font que ce bilan est établi aujourd’hui sur de plus en plus de projets routiers et constitue l’élément de décision majeur du décideur. Le choix qui en découle se porte en général, vers la solution qui minimise les impacts sur l'environnement et le coût global de l’opération avec un écart de prix significatif (supérieur à 10 %). A défaut, on privilégie normalement les solutions permettant d’assurer, dès la construction de la route, un service de longue durée n’entraînant qu’un entretien peu fréquent et léger, de manière à satisfaire l’usager.

Pour chaque projet routier, il est donc nécessaire de procéder à une analyse multi- critère détaillée et comparative des diverses solutions afin d’établir les atouts de chacune d’entre elles.

Pour que cette comparaison soit judicieuse, les calculs doivent intégrer notamment les facteurs suivants :

  • Les structures adoptées en fonction de la portance du sol et du trafic,
  • Le coût global,
  • L'analyse de cycle de vie de l'ouvrage sur le cycle complet (du berceau à la tombe).

D’autres paramètres difficiles à quantifier, peuvent évidemment avoir une influence dans le choix de la technique de construction, comme le coût social, la permanence du service rendu à l’usager, l’utilisation de matériaux locaux ou de production nationale, l’emploi de la main-d’œuvre locale, l’incitation économique régionale, etc.

1. Structures adoptées

1.1 en fonction de la portance du sol et du trafic

Pour que la comparaison soit valable, il convient que les structures de chaussées, adoptées en fonction de la portance du sol et du trafic, soient équivalentes au sens mécanique du terme, c’est-à-dire capables de supporter sans dégradation les sollicitations du trafic et les conditions climatiques pendant une même période de service. Dans ce cas, le choix de la technique de construction pourrait être conditionné par le prix à l’investissement initial. Mais, pour différentes raisons, la réalité est tout autre:

  • La stratégie de dimensionnement n’est pas unique. Elle peut être à durée de service courte mais à un coût d’investissement initial réduit ou à durée de service longue mais à un coût d’investissement initial plus important.
  • La stratégie égale, les structures des chaussées supportent plus ou moins bien les sollicitations du trafic et les conditions climatiques. Par conséquent, elles peuvent nécessiter, durant la période de service prévue, des séquences d’entretien différentes. Donc des coûts d’entretien courant différents.
  • Vers la fin de la période des services  prévue, la remise en état des différentes structures nécessite des travaux de renforcement différents.


Ainsi, pour pouvoir réaliser une comparaison économique entre différentes structures possibles, il est nécessaire de prendre en compte non seulement les coûts de construction, mais aussi les coûts d’entretien et de renforcement nécessaires pour que les structures assurent leur fonction pendant la même période de comparaison.

1.2. Coût Global

Pour tenir compte de l’échelonnement dans le temps des différents coûts (coût de construction, coûts des travaux d’entretien courant, coût des travaux de renforce- ment), il est nécessaire d’utiliser un taux d’actualisation pour évaluer les divers coûts à la date de construction de la voirie.

Le coût global « Ct » est ainsi exprimé en valeur actualisée. Il représente la somme dont on doit disposer au moment de la construction pour réaliser et entretenir une route sur une période de service prévue.
L’expression du coût global « Ct » s’écrit alors :

Ct = Pc + (Ec)actualisé + (R)actualisé avec Pc : coût de construction

(Ec)actualisé: l’ensemble des coûts d’entretien courant actualisés sur la période de comparaison.
(R)actualisé : l’ensemble des coûts actualisés des travaux de renforcement sur la période de comparaison.

a) Le coût de construction - Comment l’optimiser?

Le coût de construction d’une voirie en béton peut être, selon les circonstances légèrement supérieur, équivalent, voire inférieur au coût de construction des autres structures, en fonction notamment de la catégorie de la voirie, de la qualité du sol support et des paramètres liés au contexte technico-économique local.

Souvent, le bilan économique est favorable à la solution béton pour de nombreuses raisons. On peut citer à cet égard les éléments suivants :

  • Minoration des terrassements car l’épaisseur de la chaussée est plus faible dans le cas des structures béton,
  • Suppression de la « double voirie » dans les cas de voiries de lotissement: certaines solutions obligent à refaire une voirie pour les usagers lorsque la première a été détruite par la circulation des engins de chantier ; la voirie en béton résiste à ce type d’agressions et est donc définitive dès l’origine,
  • Possibilité de couler en même temps les caniveaux mais aussi les bordures de trottoirs; dans ce dernier cas, l’utilisation d’une mini-machine à coffrage glissant est indispensable,
  • Economie sur l’éclairage :consommation d’électricité et nombre de lampadaires réduits grâce à la couleur claire des voies en béton,
  • Esthétique, balisage et signalisation par mélange de teintes, textures et aspects de surface dans le cas des voies ou des parkings réalisés en béton coloré et traité (béton désactivé, béton bouchardé, etc.).
  • Il est intéressant de tenir compte de ces économies dans l’évaluation des coûts de construction des voiries en béton.

Quoiqu’il en soit, les revêtements en béton restent très compétitifs par rapport aux autres matériaux. Leurs prix (fourniture + pose) se situent dans la fourchette de 30 à 60 €/m2 en fonction notamment du type de la voirie, de la coloration et des traitements de surface recherchés (Fig. 13).

Fig. 13: Ordre de grandeur des coûts de construction des principaux revêtements de voiries et d’aménagements urbains

b) Comment actualiser les coûts d’entretien et de renforcement ?

Taux d’actualisation et coefficient d’actualisation

Pour pouvoir effectuer une intégration des coûts de construction avec ceux d’entretien et de renforcement, il est nécessaire d’utiliser un taux d’actualisation pour ramener tous les coûts à la date de construction du projet, les dépenses étant décalées dans le temps.

La valeur du taux d’actualisation « a » est égale à la différence entre l’intérêt sur le capital d’emprunt et l’inflation. Nous admettons que le taux d’actualisation, d’une année sur l’autre, est constant. Ainsi, le coefficient d’actualisation « Ca » de l’année « j » à l’année zéro « 0 » s’écrit:

Coût d’entretien courant actualisé: (Ec)actualisé

La méthode consiste à évaluer les coûts d’entretien courant actualisés en partant de scénarios d’entretien connus et établis sur la base du comportement réel des structures existantes. Si un tel scénario prévoit pour une structure donnée des travaux d’entretien courant aux âges « i », « j » et « k » dont les coûts - valeur le jour de l’étude - sont respectivement (Ec)i, (Ec)j et (Ec)k, la formule suivante permet d’évaluer le coût d’entretien courant actualisé sur une période donnée :

Coût actualisé des travaux de renforcement: (R)actualisé

La méthode consiste à évaluer ces coûts en partant de scénarios de renforcement établis sur la base du comportement réel des structures existantes. Pour amener une structure au terme d’une période de comparaison prévue, il est nécessaire d’effectuer pour certains types de chaussées des travaux de renforcement à des intervalles de temps réguliers.

Prenons « rj » le coût actuel des travaux de renforcement prévus à l’âge « j » et sup- posons que ces travaux de renforcement doivent être exécutés périodiquement tous les « j » années, l’expression du coût actualisé des travaux de renforcement sur une période de comparaison prévue « N » sera :

où: rj:

r2j : rnj :

le prix actuel des travaux de renforcement qui devraient être exécutés dans « j » années
le prix actuel des travaux de renforcement qui devraient être exécutés dans « 2j » années

le prix actuel des travaux de renforcement qui devraient être exécutés dans « nj » années.

c) Coût global « Ct »

Pour une période de comparaison « N » donnée, le coût total « Ct » d’une structure de chaussée, exprimé en valeurs actualisés, s’écrit ainsi :

Connaissant les valeurs de Pc, (Ec) actualisé et (R)actualisé pour chacune des structures envisagées; nous pouvons évaluer, pour chacune d’elles, le coût total sur la période de comparaison.
La comparaison des coûts totaux, correspondant aux différentes structures envisagées, permet ainsi de faire apparaître la technique la plus économique.

1.3. Analyse de cycle de vie de l'ouvrage

Un bilan par analyse de cycle de vie ACV doit être effectué pour chaque technique envisagée. La méthodologie employée consiste à quantifier les matériaux et com- posants, puis les substances puisées et émises dans l’environnement, en considé- rant des inventaires issus de différentes bases de données et enfin des indicateurs environnementaux parmi ceux les plus couramment employés en analyse de cycle de vie.

Les indicateurs environnementaux sont calculés pour :

  • La fabrication des matériaux de base (ciment, granulats, bitume, goujons et armatures) ;
  • Le transport des matériaux en phase de construction (transport des matériaux de
    base vers les centrales, transport des mélanges de la centrale vers le chantier) ;
  • La fabrication des mélanges bitumineux et des bétons ;
  • Les opérations de mise en œuvre sur chantier ;
  • L’entretien (y compris le transport des matériaux et des déchets).
     

Nous rappelons ici la liste des indicateurs considérés :

  • Consommation d’énergie primaire, en Mégajoule (1 MJ = 0,277778 kWh) ;
  • Consommation d’eau en litre ;
  • Contribution à l’épuisement des ressources, quantités de combustibles et de
  • matières premières rares utilisées par le projet divisées par les réserves mondiales correspondantes, ce rapport est exprimé en kg de lantane ;
  • Déchets générés en kg ;
  • Déchets radioactifs générés en kg ;
  • Contribution à l’effet de serre (potentiel de réchauffement global, GWP) en kg d’équivalent CO2 ;
  • Contribution à l’acidification, en kg d’équivalent SO2 ;
  • Contribution à l’eutrophisation, en kg d’équivalent phosphate (PO43-).


Ces indicateurs peuvent être globaux, c’est-à-dire à l’échelle planétaire, comme les indicateurs énergie et gaz à effet de serre, ou locaux/régionaux tels l’acidification, l’eutrophisation, etc.

Tous ces indicateurs sont équivalents en matière d’impact sur l’environnement, le caractère local ou régional n’enlevant rien à l’importance de chacun.
Le bilan environnemental final présente les résultats de la comparaison des solutions techniques retenues, sur le cycle complet construction et entretien.

2. Conclusion

La chaussée est une structure plane et imperméable, conçue et dimensionnée pour assurer son rôle sur une période de service minimale fixée au stade d’élaboration du projet.
Durant cette période, la route est soumise à une série d’agressions causées par les véhicules et les agents atmosphériques. Pour empêcher une détérioration irréversible de la chaussée, le Maître d’ouvrage est conduit à faire effectuer une série d’opérations d’entretien et de renforcement dont l’importance est fonction de la technique adoptée, des conditions climatiques, du trafic, etc.

Ces opérations peuvent constituer un souci permanent et des charges importantes pour la collectivité locale.
Par conséquent, pour évaluer la répercussion économique du choix d’un type déterminé de chaussée, il faut tenir compte, non seulement du coût de construction, mais aussi des coûts d’entretien et de renforcement répartis sur la période de service adoptée pour l’ouvrage.

D’autres paramètres peuvent avoir une influence dans le choix de la technique de construction mais qui sont difficiles à quantifier, comme le coût social et le coût de la sécurité.

 

 



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