L’opération combine neuf immeubles plots implantés en retrait de la rue.

Situé à l’ouest de Bordeaux, le quartier Saint-Augustin agglomère un pôle hospitalo-universitaire d’envergure internationale, plusieurs ensembles de logements datant des années soixante, un tissu d’habitations pavillonnaires et le parc des sports Lescure au sein duquel trône le monumental stade Chaban-Delmas. Inauguré lors de la Coupe du monde de football de 1938, son enceinte de style Art déco, construite en béton armé, avait marqué l’époque en étant le premier stade au monde à posséder des tribunes entièrement couvertes sans aucun pilier gênant la visibilité du public.

L’opération combine neuf immeubles plots implantés en retrait de la rue.
L’opération combine neuf immeubles plots implantés en retrait de la rue.
À l’intérieur de l’îlot, l’espace partagé est traité comme une grande prairie.
À l’intérieur de l’îlot, l’espace partagé est traité comme une grande prairie.

Des immeubles plots dans un quartier en mutation

L’opération de la caserne Faucher a pris place à proximité de cet équipement prestigieux, aujourd’hui labellisé au titre du patrimoine du xxe siècle. Composée de 56 logements sociaux, elle participe à la restructuration globale du quartier en répondant aux ambitions de densification du centre-ville affichées par l’agglomération bordelaise pour lutter contre l’étalement urbain.

Dès l’origine du projet, l’acceptabilité d’une densité importante s’est imposée comme une des problématiques majeures de l’opération d’autant que la puissance publique autorisait la construction d’un front bâti continu de cinq niveaux au-dessus du sol naturel. Projetée sur un terrain d’angle bordé de maisons en bandes et d’échoppes, la proposition des architectes Leibar et Seigneurin y répond par l’implantation, en retrait de la voie, d’une volumétrie éclatée respectant la hauteur maximale réglementaire. En permettant d’adoucir très nettement la relation avec les maisons de ville se situant en vis-à-vis, ce parti n’utilise que partiellement le potentiel constructif et offre des logements sociaux de différentes tailles et d’une exceptionnelle qualité de vue, d’ensoleillement et « d’individualisation ».

L’opération se compose de neuf « immeubles plots », disposés orthogonalement par rapport à la rue, trois par trois en suivant la pente du terrain. Depuis l’espace public, l’ensemble apparaît comme « posé » sur un socle constitué par l’ancien mur de la caserne. Côté cœur d’îlot, l’espace libre sur lequel sont érigés les immeubles est traité comme une grande prairie. L’ensemble du stationnement est aménagé de plain-pied, sous les bâtiments.

Conservé en partie, le mur d’enceinte en pierres de Gironde est recomposé dans la partie haute de la parcelle grâce à des panneaux préfabriqués en béton blanc dont la couleur, le grain et la finition parfaite se marient avec bonheur au calcaire blond des maçonneries existantes. Ainsi restauré, l’ensemble participe à l’inscription de l’opération dans le tissu urbain bordelais.

L’ensemble du stationnement est aménagé de plain-pied avec la rue, sous les bâtiments.
L’ensemble du stationnement est aménagé de plain-pied avec la rue, sous les bâtiments.
Les halls d’entrée sont accessibles depuis la rue par des failles aménagées dans le soubassement.
Les halls d’entrée sont accessibles depuis la rue par des failles aménagées dans le soubassement.

Des maisons superposées

Les 56 appartements relèvent d’une réflexion sur l’adaptation des qualités de l’habitat individuel à un programme de logements collectifs denses. Accès directs depuis les parkings et la rue, paliers individualisés, absence de voisinage de part et d’autre des appartements, ouverture sur trois ou quatre façades, absence de vis-à-vis et ensoleillement, espaces extérieurs privatifs en cœur d’îlot… tels sont les attendus mis en avant par les architectes dans leur conception. Partant de l’aspiration des habitants à l’appropriation de leur habitation, les deux associés ont mis en place une fragmentation de la volumétrie conduisant à une individualisation des logements. Accessibles directement depuis la rue par des failles réservées dans le soubassement, les halls d’entrée de chacun des trois groupements séparent les différentes poches de stationnement. Au-dessus, chaque immeuble est formé d’un « plot » central abritant deux logements et les circulations verticales auxquelles des coursives aériennes relient deux « plots » latéraux contenant chacun un logement. Les appartements, en simplex ou en duplex, proposent une partition intérieure fonctionnelle agrémentée de grandes loggias de 13 m2.

Le statut de pièce supplémentaire de ces espaces extérieurs est renforcé par le report des systèmes d’occultation au nu des façades ; une disposition qui favorise l’intégration des loggias dans le corps principal du logement, notamment aux beaux jours.

Ces éléments apportent non seulement une valeur ajoutée en termes de confort d’usage et de surface à l’opération, mais également en termes d’image. À travers eux, les façades sont traitées suivant deux registres architecturaux opposés. Verticalité répétitive et rythme de percements irréguliers établissent ainsi de subtiles variations sur le thème de la façade épaisse en combinant la rigueur d’une expression rationaliste avec un dispositif géométrique relevant de l’aléatoire.

Mis en œuvre en alternance dans les différents plots, les deux vocabulaires utilisés pour le dessin des façades favorisent l’identification et l’appropriation des logements par les habitants. Cette combinatoire permet de multiples dispositions et une grande souplesse pour l’usage des loggias, notamment en ce qui concerne leur mode d’occultation et le rapport à l’extérieur. Ainsi, composées de larges ouvertures protégées par des garde-corps transparents, certaines parties assurent de conséquents apports de lumière naturelle et des vues panoramiques sur la ville tandis que des parties pleines traitent l’éternelle question de la dissimulation des stockages extérieurs dans les logements collectifs (vélos, linge, mobilier extérieur…) sans dénaturer l’image générale de l’opération.

Plan de r+1
Plan de r+1
Plan d’étage courant
Plan d’étage courant

Un système constructif rationnel et économe

Les coûts engendrés par l’important développé de façade et la multiplication des bâtiments sont couverts par une extrême rationalisation du système constructif. Entièrement réalisés en béton, les édifices associent différentes techniques comme l’indique le plan d’étage courant (ci-dessous). Les noyaux de circulation et les espaces communs contenus dans les plots centraux sont formés par des voiles en béton armé coulés en place qui constituent les structures de contreventement. Les murs extérieurs sont montés en blocs de béton enduits sur des planchers en béton de portée limitée (6,50 m). Plaquées devant les façades principales, les loggias sont réalisées en béton blanc. Elles constituent une peau épaisse qui qualifie l’architecture de l’opération. Le système est composé d’éléments autoporteurs préfabriqués en usine. Implantés dans le prolongement des façades en parpaings enduits, les composants sont solidarisés aux corps principaux des bâtiments. Ils intègrent les rails et les dispositifs de guidage des volets roulants. À l’exception des éléments préfabriqués, les maçonneries sont protégées par un enduit à la chaux dont la finition et la teinte très claire s’allient parfaitement avec celles des panneaux de béton blanc.

Réalisé en béton blanc, les loggias composent une peau épaisse et qualifient l’opération.
Réalisé en béton blanc, les loggias composent une peau épaisse et qualifient l’opération.
Réalisé en béton blanc, les loggias composent une peau épaisse et qualifient l’opération.
Réalisé en béton blanc, les loggias composent une peau épaisse et qualifient l’opération.

Une conception thermique optimisée

Placée côté intérieur, l’isolation est réalisée classiquement par un doublage dont l’efficacité est confortée par la mise en œuvre au droit des planchers de planelles isolantes faisant office de rupteurs de ponts thermiques. Ces dispositions sont combinées à l’inertie thermique du béton et à une optimisation solaire maximale des logements tant en hiver qu’en été. Exposés est-ouest, tous profitent du large ensoleillement apporté par des baies toute hauteur. Les apports solaires conséquents sont confortés par l’absence de garde-corps opaque et régulés par les protections des brise-soleil naturellement constitués par les avancées des loggias. Forte de la conjugaison de ces facteurs, la réalisation, qui profite du label Bâtiment Basse Consommation selon la RT 2005 et d’un profil A Habitat et Environnement, propose un ensemble de logements sociaux de grande qualité d’usage.

Pour chaque logement, une grande loggia de 13 m2 offre un généreux prolongement extérieur.
Pour chaque logement, une grande loggia de 13 m2 offre un généreux prolongement extérieur.

Reportage photos : Patrick MIARA

Maître d’ouvrage : Domofrance – Maître d’œuvre : Leibar & Seigneurin – BET TCE : Cetab –Entreprise générale : MAS – Préfabricant : CICB – Surfaces : 4 276,05 m2 SHON ; 3 396,15 m2 SHAB – Coût : 5,59 M€ HT – Programme : 56 logements collectifs locatifs, 39 PLUS et 17 PLAI, répartis en 30 T2, 12 T3, 10 T4, 4 T5, 56 places de stationnement (1 parking/logement).



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